La vie de Nathan peut se résumer simplement par une famille aimante, un frère jumeau qu'il admire jusqu'au plus profond de son être, un petit frère qu'il chérie comme la prunelle de ses yeux. Une enfance admirable, du sourire, de la joie, très peu de l'arme, des « bobos » partout sur le corps, des aventures à bout de souffle dans la cabane qu'il avait construite avec son frère. Ses rêves de petits garçons qu'il dessinait dans le sable. Ses envies d'ailleurs à peine arrivé dans le monde, toujours bouger, toujours questionner, tout contrôler. Dès son plus jeune âge cette quête du monde idéal le suivait à chaque instant. Elle ne le quitta pas au collège, ni au lycée. Le lycée période ou un petit garçon essaie de devenir homme sans réaliser la tâche immense qu'il lui en coûte. Incapable de parler aux jeunes femmes, incapable de s'exprimer complètement il se met à lire, à apprendre avec acharnement tout ce qu'il peut pour dévoiler au monde entier les trésors cachés au fond de ses souvenirs d'enfant. L'époque du sable qui filait entre ses doigts est révolue, il déverse à cœur perdu des mots maladroits sur le papier, des histoires, des faits, des pensées, tout ce qui peut trouver un destin entre ses mains. Un jour les mots seuls n'ont plus suffit et c'est armé d'un appareil photo qu'il a voulu appréhender le monde.

Le lycée, Westport
"On me crie que j'ai tord, j'observe les gens autour de moi essayant de comprendre mes faits et gestes, de comprendre comment je peux passer de A à Z sans détour et aussi vite. Mon corps est submergé je voudrais exploser, c'est l'unique chose qui pourrait me délivrer de la tempête dans ma tête. Je ne sais plus ce qui à fait déchaîner ces vents mais les pulsassions dans mes mains et dans mon crane me donne envie de partir loin. Je ne veux voir personne, je ne veux plus rien entendre, je veux déverser mon esprit dans la mer et disparaître. Tu ne peux pas me dire non, t'as pas le droit de me dire non. Le contrôle il est entre mes mains pas dans les tiennes,  pas dans les leurs. M'appelle pas « ça » je déteste ça, c'est pas moi, j'veux juste que le monde tourne dans mon sens, seulement le mien. Ça se discute pas, on ne peut pas en parler, je ne veux pas bavasser sur ce qui est établi et qui ne changera jamais. J'existe non ? Je suis là tu me vois, je suis devant toi, je respire, je donne tout ce qui me constitue mais c'est jamais assez c'est ça ? Parce que toi tu veux ça et que moi je suis déjà passé à autre chose. Je peux pas penser à toi quand tu vas contre moi, je peux pas mais surtout je veux pas."

[...]

"Un jour une fille m'a retourné le cœur et l'a mis en boite. C'était si fort que ça m'a vacciné des mièvreries et des sentiments pour toute une vie, si ce n'est pas deux. J'aimerais pouvoir donner des explications cohérentes à notre rupture. Elles se bousculent dans ma tête mais rien ne sera jamais assez valable pour ce monde. Quand on aime quelqu'un on ne le laisse pas partir c'est ça ? Si on le fait c'est qu'on ne l'aimait pas assez, c'est ça encore ? Absurdités. Ils ne comprendrons jamais. Il y a d'autres gens comme moi, des gens qui ont tellement peur d'avoir mal au cœur qu'ils se l’arrachent tout seul. En clair on quitte ce qui pourrait un jouer nous quitter. J'ai lu des trucs sur le sujet, on appelle ça laprophétie auto-réalisatrice. C'est un joli nom pour quelque chose qui n'est en aucun cas plaisant. La seule vérité c'est que je me fais mal tout seul pour qu'on ne puisse pas m'en faire. Devenir hermétique à l'amour est l'unique moyen de s'en préserver. Alors j'étais là devant elle, mon cœur battant la chamade contre ma cage thoracique, je lui ai pris les mains et je lui ai dit que c'était la fin. Tu sais pas ce que c'est toi de ne pas dormir de la nuit parce qu'on imagine le pire, qu'on image d'autres mains sur son corps et qu'on la visualise souriante à ce toucher. Tu ne pourras jamais savoir ce que ça fait à mon être tout entier quand je suis à deux doigts de rendre mon cœur  parce que je n'entends plus que lui résonner dans ma tête. Tu ne pourras pas le savoir, jamais. "

Année 2012, autour du monde
"Je n'ai peur de rien. Ces 4 lettres qui terrifient des peuples entiers, qui mettent à genoux le plus brave des hommes, moi je n'en ai pas peur. Je ne peux pas avoir peur, je n'en ai pas le droit. Le devoir est mon moteur mais mon enclin pour la vérité est ce qui me pousse à me surpasser à rentrer sur le champ de bataille et faire ce pourquoi je suis payé, ramener la vérité. Je photographie tout ce qui me semble pertinent et même tout ce qui a une allure plus ordinaire, parce qu'il n'y a rien de plus vrai que les détailles qui font de l'humanité un lot commun. J’étends un sifflement insoutenable qui me met à genoux, quelque chose implose à quelques mètres de moi. J'ai le visage recouvert de saleté, mes poumons regorgent de poussière, j'ai du mal à m'orienter moi qui ai déjà si peu de repère en temps normal. Je ne reconnais plus rien, j'entends des cries sourds tout autour de moi. Maintenant j'ai peur, peur de mourir. Je reste immobile cherchant du regard mes collègues mais surtout amis, je les comptes mentalement ils sont tous là. Ici j'ai vu la beauté de ce monde mais j'ai aussi vu le prix de la beauté. Le rêve a laissé place au cauchemar, la vision colorés des habitations s'est transformé en un nappage noir de peur et de désillusion. Je me relève tremblant cherchant une porte de sortie. Je veux rentrer chez moi."

[...]

"Mon ventre se tord pour la centième fois aujourd'hui, des rires volatiles s'échappent de ma bouche sans que je puisse les retenir. Je me couche au sol fixant le ciel qui me surplombe, le toit du monde, c'est là que j'aimerais aller. Mes amis sont dans le même état que moi, la vie coule dans nos veines et nous rend hilare. C'est bon de vivre, c'est bon d’être revenu entier et en vie. J'ai le plus grand des sourires dessiné sur le visage et je ne peux m'empêcher de le garder, il est collé comme de la glu sur moi à en devenir une seconde nature. Ma mère trouve que mon sourire a changé, qu'il est plus expressif et surtout qu'il est plus vrai. Ça m'a fait sourire doublement, de bonheur d'avoir retrouvé ma mère et de fierté d'avoir accompli ce pourquoi j'étais parti. J'avais enfin trouvé cette relique sacrée qu'est la vérité. La vie n'a plus de mystère pour moi, son sens non plus. Il faut vivre l'instant, se laisser baigner par les sensations et vénérer le sol sur lequel nous avons mis les pieds, parce qu’être en vie est le plus beau des cadeaux. Cette planète regorge de possibilités infinies, il faut toutes les prendre, il faut se donner corps, cœur et âme à cette tâche qui est de subsister et de célébrer la vie. Tu vas crever ça tu ne peux pas en douter mais tu crèveras le sourire aux lèvres."


New Delhi, Mercredi 26 Mars 2014
"Mais ça aussi c’est de la connerie, j’écris pour oublier, il y a quelque chose qui m'explose les poumons, mais c’est tellement voluptueux que ça me donne la nausée. J'sais pas quoi dire, j'sais pas comment le dire surtout, j'sais pas si tu comprendras ou si ça passera. J'sais même pas si tu te rends compte, je pense pas que tu puisses réaliser, c’est bien le souci. Mais d’une certaine manière tout me ramène à ta personne, ça non plus je sais pas comment le dire ni même comment l’expliquer, y a quelque chose de bizarre là-dedans, c’est pas divin mais c’est presque le cas. J’aurais peut-être du essayer d’écrire une lettre d’amour mais maintenant, maintenant je ne sais même plus parler d’amour car entre temps j’ai oublié ce que c’était. Passé un temps on ne sait même plus ce que l'on aime, pourquoi on aime, ni même ce qu’il y a de beau dans tous ça. Le comble de l’ironie c’est qu’on trouve même ça laid, et on a la haine, la haine d’aimer quelque chose qui nous fout six pieds sous-terre. C’est à ce stade que je me trouvais à ce moment là, j’avais envie de t’envoyer valser au loin, très loin voir autre part encore plus loin, sans souhaiter ta fin, je voulais que tu disparaisses. La réalité c’est que ça n’aurait pas changé grand-chose, je t’aurais quand même aimé, mais ta simple vu me rendait malade. La vérité, parce que c’est tout de même le but, la vérité c’est que j’avais tellement peur que tu me lâches la main un jour que je m’en suis presque coupé le bras pour ne jamais avoir à ressentir ça, en d’autres termes : j’ai fuis, j’ai lâché prise avant que tu ne puisses le faire, parce que putain je voulais pas voir mon cœur en miette, pas maintenant, pas à 22 ans. C’est bien, oui je crois que c’est une bonne chose de parler de ça maintenant, parce que je sais ce qui va se passer, je sais ou on est entrain d’aller, ou tu es entrain d’aller, bientôt on ne sera plus, si toute fois on a déjà été, mais plus que jamais on sera dans deux univers différents, parce que le moment final arrive, celui qu’on attend tous depuis des siècles, têtes levées vers le ciel, peut-être qu’ils avaient raison, peut-être est-ce bien la fin, la fin de toi."